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Une fin d‘année 2019 fructueuse pour l’ADLC

Une fin d‘année 2019 fructueuse pour l’ADLC

Publié le : 08/01/2020 08 janvier janv. 01 2020

Article écrit par Me Sylvie Cholet

L’année 2020 s’entame après un mois de décembre 2019 sous le signe de la répression pour l’Autorité de la concurrence qui a rendu trois décisions de condamnation de pratiques anticoncurrentielles.
 
  • Un montant total d’amende infligée de 623,3 millions d’euros.
Ce montant fait figure de record alors que les 12 autres décisions rendues la même année ont totalisé 9 millions d’euros d’amendes prononcées (exactement 9.065.011 euros).
 
  • 2 ententes horizontales et 1 abus de position dominante.
Seule l’une des décisions a été publiée à ce jour (1°), les deux autres ayant fait l’objet d’un communiqué disponible sur le site de l’Autorité (2°).

1°) Le cartel des compotes et la clémence (décision n° 19-D-24 en date du 17 déc. 2019)

6 fabricants concurrents de compotes ont été condamnés à 58,3 millions d’euros d’amende pour s’être entendus entre 2010 et janvier 2014 aux fins d’augmenter leurs prix de vente auprès des opérateurs de la grande distribution sous marque de distributeur (MDD) auprès des distributeurs du secteur de la restauration hors foyer (RHF), et de se répartir les volumes et les clients.

Cette condamnation trouve son origine dans la demande de clémence formulée par l’un des participants, la société Coroos Conserven BV, qui était en partie à l’origine de l’entente puisque les réunions anticoncurrentielles avaient été déclenchées en 2010, après qu’elle ait manifesté sa volonté de mener une politique de prix agressive - dans un contexte de baisse de rentabilité de l’activité et de pression tarifaire venant des distributeurs MDD et RHF.

En janvier 2014, elle annoncera aux autre membres son souhait de ne plus participer à l’entente en même temps qu’elle la dénoncera à l’Autorité de la concurrence. Les éléments fournis auront permis la mise en œuvre d’opérations de visite et de saisies en septembre 2015, y compris dans les locaux de Coroos, avec la coopération de l’autorité de la concurrence néerlandaise.

Finalement la décision est l’occasion de rappeler les règles bien établies en matière d’interdiction des cartels et de participation à des réunions ayant un objet anticoncurrentiel.

S’agissant d’une infraction unique et continue par objet touchant un produit de grande consommation, l’Adlc a toutefois décidé de limiter à 16% le coefficient de la sanction de base appliqué sur la valeur des ventes, au titre de la gravité de la pratique et du dommage à l’économie. l'Autorité a, à ce titre, considéré que l’importance de l’impact de l’entente devait être tempéré compte de l’impossibilité d’évaluer un effet réel important de la pratique.

La société Coroos Conserven BV est quant à elle exonérée de toute sanction alors qu’elle encourait une amende de 4,7 millions d’euros.
 
2°) Deux autres décisions en attente de publication
 
  • Echange d’informations et verrouillage du marché des titres restaurants (décision n° 19-D-23 en date du 10 déc. 2019)
4 opérateurs historiques du marché des titres restaurants ainsi que leur prestataire, la centrale de règlement des titres (CTR), ont été condamnés à hauteur de 415 millions d’euros pour deux ententes.

D’abord, il leur est reproché de s’être échangé des informations via la centrale de règlement des titres (CRT ) : la CTR envoyait mensuellement à ses membres sociétaires des tableaux de bord contenant les parts de marché et le volume des titres traités par chacun le mois précédent. Compte tenu de leurs caractéristiques (informations sensibles et confidentielles, données individualisées et récentes, commercialement stratégiques) et de la fréquence de leur envoi, l’Autorité a considéré qu’elles avaient réduit l’autonomie commerciale de chaque opérateur dans un secteur d’activité très concentré et transparent.

Le contenu de la décision – seul le communiqué est publié à ce jour – renseignera davantage sur les raisons pour lesquelles cet échange a été considéré comme ayant un effet anticoncurrentiel au regard des spécificités du marché en question.

Les protagonistes sont également sanctionnés pour avoir adopté une série d’accords visant à verrouiller le marché, par la fixation de critères d’adhésion à la CRT non objectives et opaques et par l’engagement d’exclusivité des membres sociétaires qui s’interdisaient de gérer les titres dématérialisés en dehors de la CRT.

Cette décision a fait l'objet d'un article écrit par me Sylvie Cholet paru dans la revue Lamy de la Concurrence du mois d'avril 2020: https://www.actualitesdudroit.fr/browse/affaires/droit-economique/27027/revue-lamy-de-la-concurrence-le-numero-d-avril-est-paru
 
  • Google à l’amende (décision n° 19-D-26 du 19 déc. 2019)
La boucle est bouclée avec la décision Google qui clôt l’année en termes de contentieux des PAC alors que le même opérateur avait ouvert le bal des décisions de condamnation (décision de mesures conservatoires n° 19-MC-01 du 31 janvier 2019 http://blog.selinsky-avocats.com/articles/mauvaise-publicite-pour-google-123.htm).

L’Autorité s’est intéressée à plusieurs reprises aux pratiques de domination de la firme de Mountain View sur le marché de la publicité sur Internet liée aux recherches, sur lequel elle détient plus de 80% de parts de marché. Mais elle n’avait encore jamais prononcé d’amende.

A chaque fois, le constat était le même : un service Google Ads dont les règles de fonctionnement sont non objectives et opaques, appliqués de manière discriminatoire entrainant des suspensions de compte inéquitables et aléatoires, et caractérisant un abus d’exploitation.

Pourtant, jusqu’à présent, la voie des actions correctives comportementales avait été privilégiée, sous la forme d’engagements (Navx : déc. n° 10-D-30 du 28 octobre 2010 ) ou de mesures conservatoires (Amadeus : déc. n°19-MC-01 du 31 janvier 2019 ).

Mais, voilà venue l’heure de la répression avec une amende de 150 millions d’euros, dans la continuité des décisions adoptées en 2018 par la Commission européenne (Google Shopping, Google Android et Google search Adsense).
En outre, le communiqué de presse  annonce également le prononcé d’injonctions portant sur les mêmes mesures que l’opérateur s’était volontairement engagé à généralisé lors de l’affaire Navx ce qu’il n’a finalement pas fait (notamment, clarification des règles de la plateforme Google Ads et notification individuelle préalable en cas de changement, clarification des procédures de suspension de comptes, qui doivent être strictement nécessaires et proportionnées à l’objectif de protection du consommateur).

L’Autorité avait annoncé début 2019 vouloir se concentrer sur le numérique.
Gageons que ce travail se poursuivra en 20 « 2.0 » sachant que d’autres affaires sont en cours d’instruction (notamment Amadeus).

SC
 

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