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Condamnation d’Orange pour abus de position dominante sur les marchés mobile et fixe de la clientèle « entreprise »

Condamnation d’Orange pour abus de position dominante sur les marchés mobile et fixe de la clientèle « entreprise »

Publié le : 17/12/2015 17 décembre déc. 12 2015

Comme annoncé sur ce blog le 11 mai dernier, Orange était poursuivie par l’Autorité de la concurrence. Ces poursuites faisaient suite à des plaintes formulées par Bouygues Télécom (qui s’est finalement désistée en 2014) et par SFR, ayant dénoncé les pratiques anticoncurrentielles de l’opérateur historique, mises en œuvre sur les marchés des services fixes et mobiles à destination de la clientèle d‘entreprise (dite aussi « non résidentielle»). Une décision de condamnation a été rendue ce jour, 17 décembre 2015.
 
Quatre pratiques d’abus de position dominante ont été qualifiées :
 
1°) Pratique de discrimination dans l’accès aux informations relatives à la boucle locale de cuivre, dont l’accès constitue un enjeu de concurrence important, s’agissant d’une information exclusive de son détenteur et indispensable pour les opérateurs tiers pour leur permettre notamment de démarcher et commercialiser leurs services fixes sur le marché de détail
 
2°) Pratique d’éviction par la mise en œuvre d’une politique de fidélisation de la clientèle non résidentielle sur les services mobiles,  grâce au programme « changer de mobile » (ce programme avait déjà été sanctionné par l’Autorité dans sa décision n° 09-D-36 en qu’il était mis en œuvre dans la zone Antille-Guyane)
 
3°) Pratique d’éviction par la mise en œuvre d’une politique de fidélisation de la clientèle non résidentielle sur les services mobiles grâce à des remises fidélisantes
 
4°) Pratique d’éviction par la mise en œuvre d’un système de rabais d’exclusivité pour les prestations de réseaux privés virtuels (VPN) au bénéfice des seuls clients non résidentiels confiant l’exclusivité de leurs raccordements à Orange.
 
Orange a été sanctionnée à une amende record de 350 millions d’euros : il s’agit de la sanction la plus élevée jamais prononcée par l’Autorité de la concurrence pour une entreprise individuelle.
 
Elle s’explique – malgré la prise en compte de la non contestation des griefs par Orange - au regard de la gravité des pratiques mises en œuvre de manière simultanée pendant près de 10 ans, en toute connaissance de cause (Orange est d’ailleurs en situation de réitération caractérisée, pour avoir été auparavant sanctionné six fois pour des pratiques similaires sur les 15 dernières années) par un opérateur historique occupant de ce fait une position stratégique. Ces pratiques ont affecté l’ensemble des entreprises françaises, lesquelles ont soit payé un surprix soit bénéficié de prestations moins innovantes. Selon l’Autorité, les pratiques ont en effet entravé la capacité des opérateurs tiers à faire concurrence à Orange en proposant aux entreprises des offres altératives qui peuvent être plus compétitives en pris, en qualité ou en innovation.
 
L’amende est accompagnée d’injonctions destinées à redresser les pratiques reprochées toujours en cours et ainsi, rétablir le fonctionnement concurrentiel du marché :
 
- mise en place dans les 18 mois d’un dispositif visant à garantir la fourniture aux opérateurs tiers des informations de la boucle locale cuivre, dans des conditions identiques à celles accordées aux services commerciaux d’Orange
 
- mise en œuvre de mesures destinées à cesser les remises fidélisantes et à empêcher des pratiques ayant un objet ou des effets équivalents à l’avenir
 
- mettre fin à la remise d’exclusivité et s’abstenir de mettre en œuvre toute pratique équivalente.

On relèvera que, bien que la procédure de non contestation de griefs ait été mise en oeuvre dans le respect des dispositions en vigueur en l’espèce, l'Autorité a annoncé avoir adopté une  démarche s’inspirant "également de l’esprit de la prochaine procédure de transaction, créée par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, qui sera applicable aux affaires dans lesquelles les griefs ont été notifiés après la publication de cette loi." La rapporteure générale a t-elle ainsi proposé un montant fixe de sanction, entériné par l'Autorité, de 350 millions € au lieu des 500 millions € encourus, et non un pourcentage de réfaction. On peut également noter la conclusion du communiqué qu'Orange est condamné à publier selon laquelle: "Orange a choisi de coopérer avec l’Autorité de la concurrence : elle ne conteste pas les pratiques ni leur caractère anticoncurrentiel, ni enfin l’issue donnée à l’affaire, qu’il s’agisse de la sanction pécuniaire ou des injonctions destinées à rétablir immédiatement un fonctionnement concurrentiel du marché."

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