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Pratiques restrictives de concurrence : rejet du pourvoi concernant la "taxe Lidl" dans les conventions commerciales Leclerc

Pratiques restrictives de concurrence : rejet du pourvoi concernant la "taxe Lidl" dans les conventions commerciales Leclerc

Publié le : 03/07/2025 03 juillet juil. 07 2025

Cass. com., 25 juin 2025, Pourvoi n° 24-10.440

Le 25 juin 2025, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par le ministre de l'Economie contre un arrêt du 25 octobre 2023 (pôle 5, chambre 4) dans un litige l'opposant à la Société coopérative groupements d'achats des centres Leclerc (« Le Galec »).

Pour rappel, le ministre chargé de l'Economie avait assigné le Galec en constatant que les conventions annuelles conclues en 2013, 2014 et 2015 entre le Galec et ses fournisseurs prévoyaient une réduction de prix additionnelle et inconditionnelle de 10% pour les produits également référencés par la société Lidl. Le ministre soutenait que cette réduction, surnommée "taxe Lidl", n'était assortie d'aucune contrepartie et constituait donc un avantage sans service commercial rendu, pratique prohibée par l'article L. 442-6, I, 1° du code de commerce*. Il demandait notamment l’annulation des clauses, la cessation des pratiques, la répétition de l’indu pour 83.035.774,91 euros et le paiement d’une amende civile de 25.000.000 euros.

La Cour de Paris avait confirmé le jugement du Tribunal de commerce de Paris du 11 mai 2021 en procédant par substitution de motifs : là où les premiers juges avaient considéré qu’en l’absence de service commercial prévu par les parties, le texte ne s’appliquait pas, la Cour avait au contraire admis que la remise puisse être analysée à l’aune de ce texte quand bien même elle n’était pas la rémunération d'un service commercial ou de toute autre obligation au sens des 2° et 3° de l'article L. 441-7 I du code de commerce, mais qu’elle était prévue au titre des conditions de l'opération de vente des produits (1° de l'article L. 441-7 I*). arrêt commenté sur ce site

En l’occurrence, la remise fait « partie intégrante de la négociation liée aux conditions de l'opération de vente pouvant aboutir à des réductions de prix sur le tarif des fournisseurs » et sa « contrepartie attendue par ces derniers n'était autre que le maintien du flux d'affaires entre les parties dans un contexte de tension concurrentielle entre les distributeurs E. Leclerc et Lidl. ». Cette contrepartie n’est pas disproportionnée « au regard des gains escomptés par ces [fournisseurs] du référencement de leur gamme de produits dans les magasins de l'enseigne E. Leclerc. ».

Rappelant les dispositions de l’article L.441-7 I du code de commerce*, combinées avec celles de l’article L.442-6, I, 1° dudit code*, la Haute juridiction

- confirme que « seul l'avantage ne relevant pas des obligations d'achat et de vente consenti par le fournisseur au distributeur doit avoir pour contrepartie un service commercial effectivement rendu. »  et

-  approuve la Cour d’appel d’avoir retenu que la remise était prévue au titre des conditions de l'opération de vente des produits, et non au titre de la rémunération d'un service commercial ou de toute autre obligation, si bien que « la remise litigieuse ne constituait pas un avantage devant avoir pour contrepartie un service commercial, au sens de l'article L. 442-6, I, 1°, du code de commerce. »

Portée
Cette décision clarifie la distinction entre les réductions de prix relevant des conditions générales de vente négociées entre fournisseurs et distributeurs, qui n'ont pas à être justifiées par un service commercial, et les avantages consentis en dehors de ce cadre, qui doivent correspondre à un service commercial effectivement rendu.


*Note : l’article L. 441-7 I du code de commerce est devenu l’article L441-3-1 III et l'article L. 442-6, I, 1°, du code de commerce est devenu l’article L442-1
 

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